On peut être heureux en retrouvant un vrai contact avec la terre et avoir une interactivité bénéfique pour elle comme pour nous. Tentons une approche symbolique, par analogies.
La terre a été désacralisée et violée, et ce que l’on devrait faire, c’est lui redonner sa part de féminité, lui permettre de redevenir partout source de vie. Prenons l’exemple d’un arbre : l’arbre est fait d’une structure et d’une enveloppe. L’élément central de la structure, c’est le tronc, qui porte la couronne et lui permet d’occuper l’espace. La majeure partie du tronc est faite de cellules mortes, remplissant leur rôle en tant que matériau de soutien : c’est le bois. La couronne par contre est la partie verte et vivante, siège de la photosynthèse, constituant une enveloppe protectrice et délimitant un espace intérieur. L’homme actuel ne considère l’arbre que dans sa partie structurelle. Il ne voit que le matériau, la partie masculine. L’enveloppe étant la partie féminine.
L’enveloppe donne à l’arbre sa vie, sa cohésion, sa dimension sociale. Nous pouvons donc voir ici comme une polarité, une partie masculine et féminine dans le même arbre. C’est la même chose pour la forêt, qui forme un organisme à la fois structuré et enveloppé.
Actuellement, on réduit la forêt aux troncs de ses arbres et on l’exploite sans se soucier de sa régénération. J’aimerais contribuer à rendre à la forêt sa part féminine, et au-delà que l’on reconnaisse la terre en tant qu’organisme. Partout où elle peut faire pousser des arbres, elle le fait. Ainsi, la terre se dote d’une de ses enveloppes vitales : de l’enveloppe vivante constituée par la forêt. Cette enveloppe protectrice est particulièrement importante en zone équatoriale, mais extrêmement fragile. Si nous comprenons les arbres et apprenons d’eux, nous devrions pouvoir redonner à la terre sa part de féminité et sa force de vie.
Aujourd’hui, il y a un métier dont le monde a besoin, c’est le métier de cultivateur et cultivatrice d’arbres, à partir de graines, ou de jeunes plantules. Un métier qui doit être considéré au même titre que coiffeur ou boulanger, avec sa culture générale, son apprentissage, la possibilité de faire des stages en différents lieux et un salaire approprié. La formation devrait couvrir la connaissance des espèces et de leurs interactions interspécifiques, la collecte et la préparation des graines, la biologie de la germination, la gestion des pépinières, la connaissance du milieu, les pratiques de semis et techniques de plantation et la protection naturelle des jeunes peuplements, le suivi de ceux-ci et même des principes d’expérimentation et de recherche. Ce métier va devoir être pratiqué à large échelle afin de réhabiliter l’Amazonie et d’autres forêts tropicales, mais aussi en montagne et en zones arides, partout où la terre doit retrouver sa vitalité et sa biodiversité !…
Dans tout ceci, l’eau joue un rôle essentiel. Elle est nécessaire pour la croissance : il faut 300 litres pour 1 kg de biomasse. De l’eau qui vient du sol, se transforme en nuages et retombe sous forme de pluies pour être en grande partie stockée par la forêt. Au niveau de l’arbre, sur 1 kg de biomasse, 1,5 kg d’oxygène est émis dans l’atmosphère et un demi-litre d’eau nouvelle est gardée dans les cellules; de l’eau vierge, qui n’a encore jamais circulé. Et ceci, peu de personnes le savent.
